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Gestion économe des ressources

L’ensemble de ces interactions forment un réseau. Il s’agit du réseau des fourmis. C’est ce réseau en mouvement permanent qui est à l’origine du comportement de la colonie amenant toutes les fourmis à se cacher dans le nid, ou déterminant combien partiront récolter.  Un cerveau fonctionne de même mais ce qui est admirable avec les fourmis c’est que l’on peut voir physiquement le fonctionnement de l’ensemble du réseau en direct.

Prenons un exemple,

Un des défis important pour tout type de système est celui de son cout de fonctionnement, le minimum nécessaire pour le faire tourner avec des ressources qu’il faut trouver et collecter.

Dans le désert le coût de fonctionnement est élevé, parce que l’eau manque et les fourmis moissonneuses qui y vivent doivent utiliser de l’eau pour obtenir de l’eau en retour. Une fourmi partie récolter des graines, qui les cherchent sous le soleil brulant perd de l’eau. Mais la colonie obtient de l’eau en métabolisant les graisses des graines ramenées en retour.

Dans cet environnement les interactions utilisées pour déclencher la récolte sont les suivantes : une fourmi ne sort que si elle a eu assez de contacts avec des fourmis qui reviennent. Pour la colonie ces rencontres sont cruciales : plus il y a de nourritures, plus vite les fourmis la trouve et plus vite elles reviennent et plus la colonie envoie de fourmis.

Mais il s’avère que les colonies sont différentes. Les jours secs, certaines colonies récoltent moins : chacune a sa manière propre de gérer le compromis entre, d’un côté, dépenser de l’eau pour chercher des graines et, de l’autre, obtenir de l’eau via les graines.

Il y a de petites différences entre les colonies quant au nombre d’interactions nécessaires avant qu’une fourmi n’aille récolter, car une colonie dans ce cas récolterait moins. Nous essayons de comprendre pourquoi certaines colonies récoltent moins, en comparant les fourmis à des neurones, et en utilisant des modèles des neurosciences.

En effet, des problématiques similaires existent pour le cerveau. Chaque cerveau est différent, et pour certaines personnes et selon certaines conditions, les neurones, en raison de leurs propriétés électriques, ne s’activent qu’en présence de stimuli plus importants. Les différentes sensibilités des neurones aux stimuli expliquent en partie les différences de fonctionnement du cerveau. La réaction de personne à la peur, à l’envie, … est dépendante de la manière dont le cerveau a déjà vécu ces activités, leur fréquence et leur intensité.

Pour aborder les questions de biologie évolutive, nous pouvons étudier le succès reproductif des colonies.

Tout d’abord, on remarque que les colonies filles ressemblent à leur parentes dans leur choix de récolter ou non lors d’une journée torride, alors même qu’elles vivent si éloignées que leurs fourmis ne se rencontrent  jamais : les fourmis de la colonie fille n’ont pas pu l’apprendre de la colonie mère. Les variations génétiques sont un facteur de différences entre les activités des colonies selon leur milieu.

Les expériences démontrent que si les colonies les plus actives se développent plus vite, et semblent s’en sortir le mieux sur une courte échéance de temps, une sécheresse violente et croissante n’épargnera que les colonies qui préservent l’eau. En ne sortant absolument pas quand il fait vraiment chaud dehors, et même si elles ne vont donc pas récolter le maximum de nourriture, ce sont les colonies les moins actives qui seront les plus susceptibles de pouvoir survivre dans le temps et d’avoir des colonies filles. Elles auront le meilleur succès reproductif.

On peut retrouver ce processus de défense dans les réseaux informatiques développés depuis plusieurs dizaines d’années. Internet utilise un algorithme pour réguler les flux de données qui est très proche de celui que les fourmis utilisent pour réguler les flux des moissonneuses. On ne devrait plus parler de la toile mais d’ « Anternet »

Ainsi, un ordinateur ne transmet des données que si un signal indique qu’il y a assez de bande passante pour les acheminer. Quant au début d’internet, les coûts de fonctionnement étaient élevés, et qu’il était très important de ne pas perdre de données, le système s’est organisé pour que ce soit les interactions les plus fréquentes qui activent le flux de données.

Il est intéressant que les fourmis utilisent un algorithme aussi proche que celui que nous avons inventé. Mais ce n’est là qu’un des rares algorithmes communs que nous connaissons, alors que les fourmis ont eu 130 millions d’années pour en développer de nombreux autres. Il y a de grandes chances pour que certaines des 12 000 autres espèces disposent d’algorithmes tout aussi intéressants pour le fonctionnement des nouveaux réseaux.

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